Pourquoi est-il si facile de croire aux fausses nouvelles?

Pourquoi est-il si facile de croire aux fausses nouvelles?

90%. C’est le pourcentage de Canadiens qui, selon une étude de 2019, ont déjà cru à une fausse nouvelle vue en ligne. Alors que de plus en plus de personnes prennent conscience de l’ampleur des fausses nouvelles, pourquoi est-il si facile de tomber dans le panneau?

 

L'étude avait été menée dans 25 pays par l’Ipsos pour le compte du Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale.

 

Si les fausses nouvelles réussissent à berner autant d'individus, c’est parce qu’elles sont créées afin d’être rapidement accrocheuses pour l’internaute. Des chercheurs de l’Institut de technologie du Massachusetts avaient constaté dès 2018 qu’une fausse nouvelle était 70% plus susceptible d’être « retweetée » qu’une nouvelle véridique. Ces publications mensongères voyagent également six fois plus rapidement qu’une vraie nouvelle.

 

Il y a plusieurs facteurs sur lesquels les créateurs de fausses nouvelles jouent afin de rendre leurs publications plus accrocheuses. En voici quelques-uns.

 

Les émotions et le sensationnalisme

Puisqu’elles sont inventées de toutes pièces, les informations que l’on retrouve dans une fausse nouvelle sont inédites. Le lecteur a l’impression de lire une exclusivité, et cet aspect de nouveauté rend la nouvelle attirante.

 

Mais en plus d’être inédites, les fausses nouvelles tentent surtout de jouer sur les émotions des internautes, en suscitant de la peur, de la colère, du dégoût ou de la surprise. Vivre de fortes émotions lors de la lecture d’un texte ou même en lisant un simple mème, peut amener le lecteur à ne pas prendre le pas de recul nécessaire afin de se demander si l’information est vraie ou non. 

 

Étant bien conscients de ce réflexe, les créateurs de fausses nouvelles mettent en place des publications qui font réagir, et qui incitent le lecteur à aimer, commenter et partager la publication. Une des façons de faire est de créer des nouvelles qui sortent de l’ordinaire et qui semblent spectaculaires. Des vidéos truquées de vaisseaux extraterrestres, des images de chats géants ou de requins nageant dans des rues inondées, les exemples sont innombrables - et souvent plutôt loufoques! 

 

Les célébrités

Plusieurs célébrités sont victimes de fausses nouvelles. Par exemple, des vidéos Tik Tok ont annoncé que l’actrice Zendaya est enceinte, des vidéos de deepfake ont fait croire que Mark Zuckerberg se vante de contrôler des milliards de données volées et des articles ont affirmé qu’Avril Lavigne serait morte et qu’un sosie a pris sa place. Toutes ces publications sont fausses, et les vedettes en question ont démenti ces rumeurs. 

 

D'innombrables célébrités ont dû contredire de fausses nouvelles ayant annoncé leur mort; c’est le cas de Cher, de Lindsay Lohan, de Will Smith, de Justin Bieber et de Kanye West, pour n’en nommer que quelques-uns  (en effet, les fausses nouvelles sur des célébrités abondent, selon le site de vérification des faits Snopes). 

 

L'image des célébrités est même parfois volée pour faire croire qu’elles endossent certains produits. Des images ou des vidéos truquées montrent des célébrités, comme Ariane Moffatt, Kelly Clarkson et Sarah-Jeanne Labrosse, et font croire qu’elles endossent des régimes alimentaires extrêmes, produits magiques ou suppléments minceur. Ces publications mensongères sont régulièrement dénoncées par des vedettes. 

 

Aussi, les fausses nouvelles sont souvent présentes à la suite d’un événement tragique. Par exemple, en 2017, après l’attentat à la Manchester Arena, qui a eu lieu après un spectacle d’Ariana Grande, plusieurs images ont circulé montrant la chanteuse en sang. Ces images dataient de 2015, alors qu’Ariana Grande était sur un plateau de tournage.

 

En bref, les créateurs de ces publications mensongères savent que les célébrités et les émotions fortes attirent les clics, il faut donc redoubler de prudence quand les deux s’entremêlent !  

 

Sujets polarisants

Tout ce qui divise peut être transformé en fausse nouvelle. Les sujets polarisants, comme la politique, l’environnement, l’immigration et la santé, touchent souvent des cordes sensibles, donc suscitent de fortes émotions qui, là encore, empêchent de prendre un pas de recul pour vérifier l’info.

 

C'est ainsi que les fausses nouvelles concernant l’immigration vont souvent cibler les croyances et les préjugés des lecteurs. Par exemple, en 2017, plusieurs publications sur les réseaux sociaux affirmaient que le gouvernement donnait aux demandeurs d’asile haïtiens un passage gratuit au Canada, ce qui est faux, mais a néanmoins fait réagir nombre d’opposants à l’immigration. La politique peut aussi être polarisante, et les publications mensongères visent souvent à tirer sur les cordes sensibles du lecteur, afin de le choquer ou de le conforter dans ses croyances

 

On a pu voir pendant la pandémie combien des sujets comme les masques, les mesures sanitaires et les vaccins, étaient de nature à susciter de fortes émotions, et les fausses nouvelles y ont trouvé un terreau fertile. De la même façon, les débats sur des remèdes miracles peu coûteux étaient souvent nourris par ceux qui voyaient dans la pandémie un complot du Big Pharma. 

 

Les changements climatiques sont un autre exemple. En 2020, plusieurs groupes climatosceptiques ont affirmé que des extrémistes de gauche avaient allumé les feux de forêt en Oregon. Le FBI a dû démentir les accusations. Des accusations similaires avaient circulé en Australie lors des immenses feux de brousse du début de 2020.  


Toutes ces approches profitent abondamment des biais cognitifs présents chez chacun de nous. Être conscient de ses propres biais, de ses idées préconçues, de ses préjugés, et des stratégies qu’emploient les créateurs de fausses nouvelles, est un excellent premier pas pour s’armer contre la désinformation. 

 

Crédit image : 123RF

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